samedi, 20 février 2010
"Une Fraîcheur au-dessus de l'Histoire"
Après les sornettes dont il est question dans la note précédente, c'est un rare bonheur que de se replonger dans Larbaud. Je reçois — en même temps qu'un mince volume de Jean de Lingendes, poète oublié pour lequel il avait une tendresse particulière — un exemplaire de ce Domaine français qu'on n'a pas jugé bon de rééditer, alors qu'il est désormais à peu près introuvable — sauf au prix fort, chez des bouquinistes qu'il serait pléonastique de qualifier d'escrocs. Larbaud n'est pas seulement un dilettante, un amateur au sens le plus noble du terme : c'est aussi un exégète d'une grande élégance, un "suffisant lecteur", qui, bien avant et mieux que "les maistres du mestier", a su faire partager ses enthousiasmes à propos d'auteurs aussi rares que Maurice Scève ou Édouard Dujardin. Derrière chaque phrase de Larbaud, on entrevoit l'homme, aimable et sensible, qu'on aurait voulu connaître...
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mardi, 16 février 2010
Critiquature 2
L'intelligence et la finesse d'analyse font rage dans nos magazines. "La poésie, affirme par exemple le désopilant Charles Dantzig, est la forme la plus arriérée de la littérature." (Nouvel Observateur, semaine du 11 au 17 février) On ne sait s'il faut mettre ce genre de propos au compte de l'imbécillité ou d'un sérieux problème de vocabulaire. À vrai dire, on s'en fiche un peu et l'on tourne la page sans perdre davantage son temps. Dans le supplément "Télé Ciné" du même numéros, c'est Gérard Depardieu qui conculque, en vrac, romancières et romanciers. Seule trouve grâce à ses yeux Marie N'Diaye, "cette femme très digne qui a eu le Goncourt et qui ressemble effectivement à ce qu'on peut imaginer d'un écrivain". Venant d'un aussi subtil aristarque, l'éloge tient du pavé de l'ours...
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dimanche, 14 février 2010
"Ah ! Gudule, viens m'embrasser..."
Saint-Valentin : fête des fleuristes, bijoutiers et autres marchands de frivolités... Nous ferons une longue promenade dans la neige et boirons au retour un verre de lambrusco blanc.
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vendredi, 12 février 2010
Senilità
Sans doute notre espérance de vie s'est-elle accrue en quelques décennies ; néanmoins, il arrive toujours un moment où l'on ne peut plus guère rapporter à soi le premier vers de la Divine Comédie.
18:45 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (1)
lundi, 08 février 2010
"Les enfants qui s'endorment la main posée sur la poitrine"
Je referme Lauve le pur, l'un des rares textes de Richard Millet que je n'avais pas lu — et sans doute l'un des plus tragiquement sombres, à peine éclairé par une dernière page aux accents vialattiens : "L'Auvergne est le Tibet de l'Europe, dans la lumière des origines." Le style est, comme toujours, admirable : succession d'interminables hypoparataxes où les soliloques masochistes et désespérés de l'éponyme, alternant avec les voix du chœur féminin, tressent une amère confession où la tristesse de la chair s'étale jusqu'à la nausée.
19:21 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (4)
jeudi, 04 février 2010
Choses vues 3
Une naine en ciré jaune, retour des commissions, clopine prestement, poussant son minuscule chariot. Je pense à la scène finale de Don't Look now.
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lundi, 01 février 2010
La vieille dame indigne
Cela pourrait encore s'intituler "Mort d'un personnage" ou "A Confederacy of Dunces". Rose Chapotel, en butte aux cagots et aux imbéciles, a préféré disparaître plutôt que d'invoquer le droit à l'ironie et les vertus de l'irrespect. Regrettable mais sage décision. Rabelais, qu'elle aimait à citer, fixait une limite raisonnable à sa propre liberté de parole : "Jusques au feu, exclusive." Il est prudent, parfois, de ne pas s'exposer à la vindicte des bons apôtres.
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samedi, 30 janvier 2010
Retirance
La rumeur du monde m'est de plus en plus indifférente. Entendre, à la radio, à l'heure du petit-déjeuner, que tel politique pléonastiquement pourri s'est attiré les foudres d'un autre qui ne l'est pas moins — ou quelque chose du même goût — m'assomme. Je m'emmitoufle et sors, baladeur au cou, bonnet enfoncé jusqu'aux yeux. Marcher seul dans la neige fraîche en écoutant du jazz est un plaisir de choix. Le temps est froid et humide. Dans les déchirures des nuages ouateux, le ciel est d'un incroyable bleu de dragée.
22:39 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (3)
lundi, 25 janvier 2010
Amour des listes et orgue 6
Pour peu qu'on ait envie d'écouter autre chose que Bénabar ou Les Quatre Saisons, les solderies réservent parfois d'heureuses surprises. Acquisitions récentes :
John Corigliano, Tournaments Overture, Elegy, Concerto pour piano et orchestre, Gazebo Dances (Orchestre de Louisville, First Edition, 2001) ;
Roy Harris, Kentucky Spring, Concerto pour violon et orchestre, Symphonie n° 5 (Orchestre de Louisville, First Edition, 2002) ;
Lebocal, Collectif etc... (Le Chant du monde, 2002) ;
Orchestre national de jazz/Franck Tortiller, Électrique (Le Chant du monde, 2007) ;
Mick Rossi, One Block from Planet Earth (OmniTone, 2004) ;
Jamie Baum Septet, Moving Forward, Standing Still (OmniTone, 2004) ;
David Liebman Big Band, Beyond the Line (OmniTone, 2003) ;
Marty Ehrlich, Line on Love (Palmetto Records, 2003) ;
Gianni Lenoci, Giorgio Dini, Markus Stockhausen, Ergskkem (Silta Records, 2006).
En fond sonore, Brahms, Mein Jesu, der du mich.
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jeudi, 21 janvier 2010
Petite anthologie portative 57
Ils m'ont crevé les yeux
et ils m'ont raconté le
film après.
(Brigitte Fontaine, Attends-moi sous l'obélisque, Seuil/Archimbaud, 2006)
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