vendredi, 02 décembre 2005
Guignoleries politiques
Dans Le Monde, en date du 1er décembre, cet article édifiant :
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Quand M. Frêche entonne un chant colonial
Montpellier, correspondance.
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Non moins édifiant, le verbatim de l'intervention de François Grosdidier, lors de la séance du 30 novembre à l'Assemblée Nationale (sur le site du Nouvel Observateur) : les réactions des députés donnent une haute idée de leur honnêteté intellectuelle et de leur dignité :
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M. François Grosdidier - Ma question s'adresse au Garde des Sceaux. Elle ne porte pas sur le racisme anti-blanc, phénomène sur lequel j'attends une réponse écrite, mais sur les mariages blancs. Dans ma commune, lors d'un mariage sur deux, l'hôtel de ville résonne de « you-you ». (« Et alors ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Ce sont de formidables moments de bonheur, de chaleur humaine que nous partageons avec les familles... (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains où le brouhaha couvre la voix de l'orateur)
M. Julien Dray - Ces propos sont indignes. C'est une insulte à la communauté musulmane.
M. François Grosdidier - Lors d'un mariage sur cinq, il n'y avait que les futurs époux et les témoins qui ne se connaissaient manifestement pas. (Brouhaha croissant sur les mêmes bancs qui rendent l'orateur inaudible)
M. le Président - Je vous en prie.
M. François Grosdidier - J'ai vu des époux qui avaient quarante ou cinquante ans de différence (Mêmes mouvements). L'amour peut ne pas connaître l'âge, mais lorsqu'il ignore la tendresse, cela pose problème. (L'orateur poursuit son propos dans les huées et les claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; des députés socialistes se lèvent en signe de protestation)
Sur 170 000 étrangers qui s'installent chaque année sur notre territoire, 34 000, soit 20%, le font par le mariage. La loi relative à l'immigration, qui a renforcé les pouvoirs du maire de vérifier le consentement des époux, a permis une réelle amélioration, même si les Parquets sont parfois saturés pour répondre aux alertes des maires. (L'orateur poursuit son propos, que seul un enregistrement peut ici permettre de restituer) Le plus gros problème réside dans le nombre de mariages conclus à l'étranger, dont la transcription en France est automatique et vaut obtention d'un titre de séjour.
Il faut renforcer les moyens de contrôle tout en respectant le droit au mariage, comme l'a annoncé hier le Premier ministre, à l'issue du troisième comité interministériel de contrôle de l'immigration. Monsieur le Garde des Sceaux, comment sera contrôlée la validité d'un mariage conclu à l'étranger ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; très vives marques de protestation et huées persistantes sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)
M. le Président - La parole est à M. le Garde des Sceaux. (Mêmes mouvements)
M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice - Si vous le permettez, quelques éléments d'information et de réflexion sur ce délicat problème. Lors du comité interministériel de contrôle de l'immigration présidé hier par le Premier ministre, j'ai en effet présenté un projet de loi tendant à rendre plus difficile l'acquisition de la nationalité afin de mieux contrôler la validité du mariage, en cas de mariage mixte. (Brouhaha persistant sur les mêmes bancs)
Il ne m'est guère possible de parler dans ce brouhaha, Monsieur le Président.
(Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)
Sachant qu'aujourd'hui, un tiers des mariages sont des mariages « mixtes », entre Français et étrangers, nous souhaiterions que les règles qui s'appliquent en France puissent s'appliquer demain à l'étranger et que donc l'officier d'état-civil diplomatique reçoive les candidats au mariage pour mesurer leur volonté réelle de vivre de façon matrimoniale, en communauté de vie affective et matérielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)
Sachant d'autre part que la moitié des acquisitions de nationalité par déclaration proviennent du mariage, nous proposons, dans le projet de loi, de porter le délai requis de deux à quatre ans, afin que la communauté de vie soit évidente pour tout le monde.
Nous concilierons ainsi notre volonté humaniste avec la nécessité de vérifier qu'un mariage est un vrai mariage et que l'on n'emploie pas le code civil contre les intérêts du pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)
M. le Président - Je crois que nous devons garder la mesure (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) et faire attention à certains propos.
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Une fois encore, j'ai envie de citer Zo d'Axa, qui écrivait ceci en 1898 :
"Citoyens, on vous trompe ! On vous dit que la dernière Chambre, composée d'imbéciles et de filous, ne représentait pas la majorité des électeurs. C'est faux [...] Ne protestez pas : une nation a les délégués qu'elle mérite.
[...] Faites la chambre à votre image. Le chien retourne à ses vomissements, retournez à vos députés."
11:09 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (3)
jeudi, 01 décembre 2005
Petite anthologie portative 14
Un solo pájaro
sobreviviente
vuela al socorro
del jardín yerto bajo la nieve
y salva apenas
una hoja verde.
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Un seul oiseau
survivant
vole au secours
du jardin roidi sous la neige
mais sauve à peine
une feuille verte.
(Jorge Carrera Andrade, "Quipos" III, in Vocación terrena, 1972 — trad. Claude Couffon : Registre du monde, Orphée / La Différence, 1997)
18:37 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (0)
Travaux
De guerre lasse, je me suis exécuté : la branche litigieuse est à terre.
Ainsi qu'une bonne partie de la toiture du voisin, qu'elle a entraînée dans sa chute.
Je lui aurai au moins montré ma bonne volonté : il devrait m'en savoir gré.
17:35 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (4)
La profondeur lyophilisée d'A.S. Pinketts
(La Madone assassine, p. 158)
Faut-il ajouter un commentaire à l'intention des culs-bénis de la bien-pensance ?
11:32 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 30 novembre 2005
Mammon
Maurice Girodias rapporte que le papier à lettres d'Henry Miller s'ornait de ce proverbe portugais :
22:02 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (2)
Papistes et huguenots
Dans La Croix du 30 novembre :
"Je me souviens qu’aux seconds troubles nous étions en garnison à La Charité. Étant en garde, s’il passait un homme avec une braguette, nous l’appelions papiste, et la lui coupions : c'était mal fait, d’autant que, sous tel signe, y a de grands mystères quelquefois cachés, vu que papiste peut signifier père de la foi ou suivant la foi paternelle. Je m’en repentis et m’en allai à Cosne, où nous nous fîmes soldats derechef, et nous mîmes ès bandes catholiques. Il nous advint une autre cause de remords de conscience : c’est que, voyant ces ébraguettés, les disions huguenots . Notre bon ami Budé m’avisa de ce péché, m’instruisant que ce mot était grec, signifiant heureusement connaissant." (Le Moyen de parvenir, chap. 15, "Dessein")
20:20 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (2)
Ta mère t'a donné comme prénom...
Sur un site consacré au "traumatisme du prénom" :
"Lorsque des parents sont à la recherche d'un prénom et qu'un dictionnaire de la mythologie leur tombe entre les mains, ils iront bien souvent à la rencontre d'un héros peu connu, dont l'histoire révèle un fantasme inconscient caché, une régression vers l'enfance."
Le dictionnaire de Trévoux peut aussi leur donner des idées :
"Caca : s.f. et nom propre de femme. Caca. C'est la sœur de Cacus, dont parle Virgile au VIIIe liv. de l'Énéide. Elle fut honorée à Rome comme une déesse. Voyez Lactance liv. I, ch. 20 ; Servius sur l'endroit de Virgile cité v. 190. Elle avoit un temple dans lequel on lui entretenoit comme à Vesta un feu perpétuel."
07:40 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (6)
mardi, 29 novembre 2005
Books think for me
"— Vous avez raison, il faut être une œuvre d'art ou porter une œuvre d'art.
— Oscar Wilde ?
— Non, éditions Oscar Mondadori. Le Livre des citations."
Pinketts a le sens de la démythification ironique : la plupart du temps, la pratique de la citation relève moins de l'érudition que de la fumisterie. Il arrive pourtant qu'elle révèle une connivence, esquisse une complicité intellectuelle ou témoigne d'une simple révérence, à partir de quoi s'élabore tout un jeu de clins d'œil intertextuels.
Ainsi chez Simon Leys, qui publie chez Plon Les Idées des autres. Glosant brièvement une formule de Vialatte — "La gravité est le plaisir des sots" — Leys nous livre une confidence malicieuse, qui nous ramène à Montaigne et à la gravité de l'âne ("Est il rien certain, resolu, dedeigneux, contemplatif, serieux, grave, comme l'asne ?"), par le biais d'une autre comparaison animalière : "Ayant passé une grande partie de ma vie dans des universités, j'ai été amené à fréquenter un nombre considérable de personnages graves et d'esprits sérieux. On ne trouve d'équivalent à cette gravité-là que chez les grands mammifères du zoo (vous aurez déjà remarqué d'ailleurs que votre chat et votre chien ne sourient jamais)."
Sur ce dernier point, je ne serai pas aussi affirmatif, mais c'est là une autre question.
23:05 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (0)
Le sens de l'épigraphe
Dans le Nouvel Observateur du 17 au 23 novembre 2005, compte rendu du livre d'Alexandro Jodorowski, Mu, le maître et les magiciennes :
"Et Mu ? En chinois, ça signifie "meuh". En exergue beuglent deux citations, un poème de Wumen Huikai (1183-1260), "Mu, mu, mu, mu, mu..." (répétez vingt fois), et un proverbe espagnol : "Le bœuf a parlé et il a dit meuh." Dont acte..."
Vachement prometteur.
Je ne me rappelle pas avoir lu quoi que ce soit de Jodorowski, et je n'ai qu'un très vague souvenir de son film, La Montagne sacrée: un arbre couvert de poulets vivants, que l'un des personnages taille en pièces à coups de sabre, un homme nu déféquant dans un pot de chambre en verre...
21:55 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 28 novembre 2005
Polars 3
Et, en outre, fort instructif : j'apprends ainsi, en poursuivant à petites étapes la lecture de Pinketts, que "La Vierge est parfois routinière [...] Au 140 de la rue du Bac, là où elle était apparue à Catherine Labouré, elle se présenta à Justine Bisqueyburu, le 28 juin 1840." (La Madone assassine, p. 107) Cette apparition est à l'origine de la dévotion au "scapulaire vert du cœur immaculé de Marie", dont Pie IX encouragea la diffusion. Si c'est pas de la culture, ça ! ...
22:46 Publié dans Mes inscriptions | Lien permanent | Commentaires (4)