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mercredi, 09 novembre 2011

Papiers journaux, bonshommes Ripolin et continuité des parcs

Je termine la lecture du septième volume des Carnets de Calaferte — année 1983. Beaucoup de notes à caractère intime, de considérations d'ordre religieux, mystique, voire ésotérique, de ressassements ou de généralités qui peuvent devenir, à la longue, un peu lassants. On a plaisir à retrouver au détour d'une page l'imprécateur vitupérant l'époque et s'asseyant sur les bien-pensances littéraires :

"De quelque bord qu'elle se pratique, la politique est un dépotoir."
"Rimbaud est le poète du calcul, pour ne pas dire l'antipoète ; ce qui explique la faveur actuelle dont bénéficie son œuvre en une époque où l'essence de la poésie est bannie..."

Propension des auteurs d'écrits diurnaux à s'entregloser, à citer les citateurs, conduisant le lecteur à s'égarer dans des quêtes-gigognes : André Blanchard cite Calaferte, Cabanis ou Renard ; Calaferte cite Gide, Green, Tolstoï ou Cabanis ; Cabanis cite Léautaud, Green ou Viel-Castel... On croise inévitablement, chez les uns ou les autres, Stendhal, les Goncourt et Jouhandeau. Littérature égotiste, reflet répercuté à l'infini de notre propre solitude, qu'avec le temps et l'âge on en vient à préférer à la verbeuse futilité du roman...

mardi, 01 novembre 2011

Le grand style 19

Sur une invitation à un vernissage, reçue cette semaine :

"Nous vous convions pour le week-end [...] à venir voir L'Aventure de l'Art qui se poursuit, pictural ou sculptural, par perpétuation, approfondissement ou bouleversement. La capacité à différer de l'imitation par une intériorité personnelle c'est : la "Nature" dans ce qu'elle a de continuité dans la diversification perfectionnante et exemplaire."

"— Seigneur, sans doubte ce gallant veult contrefaire la langue des Parisians..."

dimanche, 30 octobre 2011

Choses vues 6

Au petit "Casino" : sur la banque réfrigérée où sont les chevretons, le gaperon et la tomme de montagne, trônent sucettes "Chupa Chups", briquets "Bic" et préservatifs en boîtes de cinq. Lubrifiés.

mercredi, 12 octobre 2011

Petite anthologie portative 68

Choses qui ne font que passer

Un bateau dont la voile est hissée.
L'âge des gens.
Le printemps, l'été, l'automne et l'hiver.

(Sei Shônagon, Notes de chevet, trad. A. Beaujard, Gallimard/Unesco, 1966)

lundi, 26 septembre 2011

Haut-Allier

Ce week-end, escapade touristique et gourmande dans le Haut-Allier. Villages accrochés à leurs pitons rocheux, ou blottis, en contrebas, dans un méandre de la rivière. Sapins noirs. Horizons bleus.
À Saint-Ilpize, sur une vieille plaque émaillée, marquée de dartres rubigineuses, se devine encore une inscription comminatoire : "La mendicité est interdite dans le département de la Haute-Loire". À Lavoûte-Chilhac, une pancarte pâlie par le temps rappelle qu'il est défendu "de faire ou de déposer des ordures" dans le passage conduisant à l'église où l'on vénère Notre-Dame Trouvée.
Déjeuner dans un hameau proche de Langeac. Cuisine roborative et généreuse. La première assiette — "pounti" accompagné de salade et de jambon cru — suffirait à calmer les appétits les plus féroces, mais il serait malséant de ne pas faire honneur ensuite à la truite, au "patia" de pommes de terre à la crème et à l'ail, au civet de lapin, à la tomme de montagne encroûtée d'artisons, à la glace arrosée de verveine verte... Tout cela servi en quantités pléthoriques. L'addition est dérisoire. Quel citadin chagrin oserait s'étonner qu'on ignore ici l'usage de la carte de crédit ?

dimanche, 25 septembre 2011

Remembrances du vieillard idiot 11

Je ne sais plus en quelle année elle fut, au lycée de M., mon professeur d'anglais (sa féminité débordante la dispensait de revendiquer l'étiquette de professeure — qui eût d'ailleurs paru quelque peu barbare à l'époque). Il me reste d'elle le souvenir d'une jeune femme blonde, pulpeuse et cambrée au-delà de la décence, et une dédicace à l'encre verte, sur la page de garde d'un volume de Poe qu'elle m'avait offert — parce que j'étais un cancre brillant — à la fin de l'année de troisième :
"May you read it in english."
Je ne sais plus si c'est elle — je n'ai jamais su son prénom — qui nous avait donné à lire un merveilleux poème dont, pendant des années, j'ai recherché l'auteur sans que jamais le texte cessât de me hanter :

"... Tell the drummer
the rebels have crossed the river and no one is here
but John with the broken drumstick and half-wit Peg
who shot spitballs at the moon from the belvedere.
Tell the feverish drummer no man is here."

Qu'est-il advenu d'elle ?
Je ne l'ai jamais oubliée...

lundi, 05 septembre 2011

Le sens de la formule 9

"Quand on se sent vraiment seul, il vaut mieux être seul tout seul que seul en groupe."

(Jacques A. Bertrand, J'aime pas les autres, Julliard, 2007)

dimanche, 04 septembre 2011

Vacances 2

"Événement : Se dit aussi des choses grandes, surprenantes et singulières qui arrivent dans le monde." (Dictionnaire de Furetière)

J'ai acheté une automobile rouge et nous sommes partis en vacances — entendez : partis ailleurs pour n'y rien faire de plus que chez soi.

À la mer, je n'ai trempé crûment nulle allemande stupidement bouleversée, mais j'ai vu toute une variété de gens sans importance, exhibant sans vergogne tétasses et bedondaines, recuites ou blafardes.

Nous avons envoyé une douzaine de cartes postales d'une laideur banale.

J'ai lu, n'ayant rien d'autre à lire, une énorme immondice de neuf cents pages, aussi vertigineusement nulle que le laissait prévoir une quatrième de couverture dithyrambique.

Nous avons pique-niqué, au retour, dans un petit bourg désert, entre Angoumois et Limousin, partageant un peu de fromage avec un chat noir amiteux et bancroche : un de ces petits bonheurs qui justifient "le vain travail de voir divers pays". Et l'achat d'une automobile rouge...

samedi, 20 août 2011

Canicule

— Que faisiez-vous au temps chaud ?
— Rien.

samedi, 06 août 2011

"... deus nobis hæc otia fecit"

Brève et déprimante incursion à Lille, où je n'étais pas retourné depuis de longs mois — ville livrée aux troupeaux de touristes qui badaudent et baragouinent en divers idiomes, aux traîne-savates et bélîtres de tout acabit ; cloaque des quartiers périphériques, où la gueusaille s'ennuie pour tuer le temps ; étrons de chiens, crachats, monceaux d'immondices à l'entrée des courées.
Il est rafraîchissant, abandonnant l'autoroute aux prétentieuses pataches des philistins bataves, de prendre au retour les chemins buissonniers ; de s'attarder dans le Morvan, au hasard des départementales bordées de chicorées bleues, de piloselles, de millepertuis ou de jacobées ; de pique-niquer au bord de la Loire, du côté de Saint-Hilaire-Fontaine, goûtant le silence absolu de la campagne assoupie dans la tièdeur de l'après-midi.
Passé le fleuve, voici le Bourbonnais — "the sweetest part of France". Nous aurons bientôt regagné notre retirance, retrouvé la paix des jardins, les bonheurs oisifs de la sédentarité...