vendredi, 31 août 2007
J'aime pas les autres
Il arrive que l’insupportable Pierre Assouline parle d’un bon livre ou d’un auteur rare. Même si ce n’est pour lui qu’une façon passablement hypocrite de se faire mousser, soyons-lui reconnaissants de rendre hommage parfois à des talents trop discrets. Ainsi, dans sa note du 28 août dernier, fait-il l’éloge de l’excellent Jacques A. Bertrand, écrivain qu’on pourrait qualifier de "notoirement méconnu", selon la formule galvaudée de Vialatte — et d’ailleurs assez proche de celui-ci par l’esprit, sinon par le style. Bon point donc pour Assouline, dont nous feindrons oublier un moment la bavarde suffisance… En revanche, force est de constater que les innombrables commentaires déposés sur son blog sont toujours d’une aussi vertigineuse imbécillité.
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mercredi, 29 août 2007
Petite anthologie portative 41
Un mur plus très jeune. En lettres noires, avec pleins et déliés : Défense d'afficher. Loi du 29 juillet 1881.
Sous juillet, une main écolière a tracé avec un clou : Le cul de Josyane P.
Dans un cœur."
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Autofiction
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lundi, 27 août 2007
Actualité littéraire 2
Dans les pages littéraires du Figaro, il y a quelques jours, on présentait L’aube le soir ou la nuit, de Yasmina Reza, comme "l’événement de la rentrée éditoriale". Pourquoi pas événement ou rentrée littéraire ? Ce n’est pas que l’auteur de l’article ait voulu manifester la moindre réserve quant à la valeur du livre : c’est simplement qu’il avait déjà utilisé l’épithète dans la même phrase pour qualifier cette "chronique de la campagne présidentielle". "Chronique littéraire", donc. Scrupule stylistique qui dénote le sérieux de la recension.
Marie Darrieussecq change de registre animalier. Après le succès de ses Truismes, elle poursuit, depuis quelque temps semble-t-il, dans la veine de la singerie (Littré : "Imitation gauche ou ridicule"). D’autres récrivent les faits divers… C’est peut-être mieux que de pomper sur ses petites camarades, mais on peut tout de même préférer Félix Fénéon à Mazarine Pingeot. C’est un peu, disons, comme Eric Satie et Richard Clayderman.
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samedi, 25 août 2007
Principe de précaution
Vaguement enchifrené, je consulte la notice d’un médicament pour pulvérisations nasales (indications : "nez bouché", "rhume de l’adulte"). La liste de possibles "effets non souhaités et gênants" (formulation à l'évidence euphémique) ne laisse pas de m’inquiéter :
"Effets locaux : Saignements de nez, irritation de la gorge, sensations de brûlure nasale, d’éternuements, de sécheresse de la muqueuse du nez ; manifestations allergiques locales, troubles du goût et de l’odorat, candidose nasale.
Effets généraux : Maux de tête ; palpitations, poussée d’hypertension artérielle, sueurs, troubles du comportement, nausées, vomissements ; crise de glaucome aigu.
Peuvent également survenir : troubles urinaires, sécheresse de la bouche, convulsions, hallucinations, agitation, anxiété, insomnie. Exceptionnellement : accidents vasculaires cérébraux, risque de gêne respiratoire…"
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Ton corps est à toi
Déniché avant l’été au marché de Wazemmes, sur l’étal d’un bouquiniste, puis oublié dans un coin : Ton corps est à toi, de Victor Margueritte (Paris, Flammarion, Select-Collection, 1947). J’aurais sans doute oublié définitivement, parmi d’autres volumes dépenaillés jetés au fond d’un placard, ce roman que je ne lirai jamais, si je n’avais entendu à la radio une "auditrice en ligne" — "enseignante, professeure des écoles", précisait-elle — déclarer employer à peu près la même formule pour mettre en garde ses petits élèves contre toute velléité de caresses de la part d’un adulte. Révulsée, la dame, à l’idée qu’on puisse seulement oser passer la main dans les cheveux d’un bambin... Le moins paradoxal, en apparence, n’est pas que ces nouveaux puritains soient les premiers à s’insurger dès qu’il est question d’enfermer les délinquants sexuels ou de les contraindre à un traitement. Mais au fond, cela procède de la même pétition de principe : leur corps leur appartient.
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vendredi, 24 août 2007
Petite anthologie portative 40
Le corps cassé
toujours vivant
je traverse l'été
(Sumitaku Kenshin, in Anthologie du poème court japonais, Poésie/Gallimard, 2002)
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Inter artes et naturam
Pancartes au bord des départementales, à l’entrée des villages perdus au fin fond de nos campagnes : vide-greniers, marchés de pays, fêtes patronales, journées médiévales, battages à l’ancienne, expositions artistiques, salons du livre… Ce ne sont que manifestations festives et culturelles, où tout se confond dans la même vulgarité désœuvrée, la médiocrité, l’ennui tapageur. Indifférence et indifférenciation. Le même public hante les barbecues géants, les concours de pétanque ou les "enduro-carpe", applaudit le "sosie de Patrick Bruel", admire les plats d’épinards des peintres du dimanche, se fait dédicacer les mémoires de Raymond Poulidor. C’est le goût des autres, et vous finissez par y venir : ce n’est pas forcément pire que ce que vous offrent les rubriques spectacles ou sorties des magazines à prétentions intellectuelles.
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lundi, 20 août 2007
Mauvais caractères
"Changements dans la langue. Il y a longtemps déjà que le français semble avoir renoncé à l’emploi des majuscules." (Jean Clair, op. cit. supra, p. 47)
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dimanche, 19 août 2007
Grande paresse
Il fait un temps à ne rien faire. Il m’a suffi d’écouter la radio quelques minutes ce matin pour être d’une humeur de chien : pas une phrase d’interview, pas un truisme, pas une pauvreté qui ne soit ponctuée d’un "donc… euh" (peut-être faudrait il remettre en usage l’ancienne graphie donques) ou d’un "c’est vrai que..." Il en faut peu, je l'admets, pour m'irriter. Cet après-midi, je termine, pour rester dans la maussaderie, la lecture du Journal atrabilaire de Jean Clair (Gallimard, "L’un et l’autre", 2006). Effet homéopathique, sans doute, j’en sors réconforté de voir qu’il y a encore, comme le chantait Brassens, "du monde, et du beau monde, sur terre". J’aimerais pouvoir reprendre à mon compte la dernière note, figurant également en épigraphe sur le rabat de la première de couverture : "Justification, peut-être, de ce journal, cette réflexion de Julien Green : Le secret, c’est d’écrire n’importe quoi, parce que lorsqu’on écrit n’importe quoi, on commence à dire les choses les plus importantes."
Nul doute que les récriminations et les dégoûts de Jean Clair — mais aussi ses rares attendrissements — ne touchent à l’essentiel "en ce temps de grande paresse" — citation d’un autre chanteur bien oublié.
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