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jeudi, 10 novembre 2005

L'anti-phébus

L'eau parfaitement limpide de certaines fontaines paraît, quand on se penche au-dessus d'elles, noire et profonde. Ainsi de ce style quasi janséniste qui est la marque propre des auteurs difficiles — aux deux sens du terme : exigeants avec eux-mêmes et réclamant du lecteur un effort particulier. Je pense à Pascal Quignard. Cette très belle page, et très simple, par exemple, sur le silence :
"Quand la mémoire fait ressortir de l'abîme où le réel s'est effondré les souvenirs, ils ruissellent de silence.
Des morts reviennent des scènes d'autrefois qui sont nettoyées de tout bruit.
Immobiles au centre de ces scènes, comme dans les photographies, comme dans les peintures de l'Occident chrétien, ils regardent en silence ceux qui les voient.
Des vivants, la remémoration ne restitue que des instants où toute rumeur est arrachée.
Tous les moments de nos songes sont aussi silencieux que les instants où le désir écarte le tissu et découvre à notre attente et pour notre confusion ce qui est nu dans toute la pénombre que font les plis qui se rebroussent." (Sur le jadis, XCII, "Le silence", Folio, 2004, p. 303)

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