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vendredi, 10 février 2006

Le grand style 12

C’est le style seul qui confère à un texte polémique le statut d’écrit littéraire, lui assure une possibilité de survivre au contexte, à l'actualité qui l’a suscité. Quelque vingt ans après qu’ils ont été fulminés, on relit avec le même bonheur les articles d’Annie Le Brun, rassemblés dans Vagit-prop, Lâchez tout et autres textes (Ramsay-Pauvert, 1990), que je retrouve sous une pile de livres oubliés. Une fête de l’intelligence, assurément, mais aussi une leçon d’écriture qui renvoie l’adversaire à son incurable indigence: "Je ne suis jamais venue ici. Le temps roule les bijoux que nous nous sommes choisis. Depuis longtemps, les embruns de la solitude ont emporté les volières roses et blanches du jour au fond de l’océan. Il y a des petites filles qui dorment déjà dans des boîtes d’allumettes. Elles partent chaque matin emmitouflées dans la nudité de leur silhouette de flamme." Le grand style, c'est aussi de pouvoir écrire cela sans tomber dans les pièges d'un lyrisme sirupeux — et corollairement niais.

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