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lundi, 09 janvier 2006

Kafka sur le rivage

Dans le Figaro littéraire, rencontre avec Haruki Murakami, à propos de la sortie de la traduction française de Kafka sur le rivage. Si l'article n'a rien d'exceptionnel — bien loin de là ! —, peut-être aura-t-il du moins le mérite de faire découvrir, à ceux qui ne le connaîtraient pas encore, l'un des écrivains actuels les plus originaux et les plus subtils. Nourri de culture occidentale, Murakami s'inscrit logiquement dans la lignée des auteurs majeurs, à travers lesquels se dessine, depuis Rabelais et Cervantès, l'évolution du roman "européen", telle que la présente Kundera. L'ambiguïté déconcertante de ses textes leur confère cette "consubstantielle ironie" dans laquelle l'auteur de L'Art du roman, voit la marque du genre. La référence à Kafka ne saurait d'ailleurs être purement accidentelle. La littérature, pour Murakami, ne s'apparente pas à une tentative de mise en ordre du monde, mais bien à une mimésis ironique — au sens socratique du terme —, à une anamorphose fantasmatique : "J'aime que les lecteurs me disent avoir lu le livre plusieurs fois et continuent à se poser des questions. C'est la fonction de la littérature de ne pas y répondre. C'est pour cela qu'elle est indispensable ; surtout de nos jours, là où les fanatismes veulent apporter des réponses définitives à tout."
Un regret : je ne pourrai jamais savoir ce que je perds — ou ce que je gagne — à ne pouvoir lire Murakami qu'en traduction...


Commentaires

C'est surtout au cinéma qu'un auteur a intérêt à être impénétrable pour inciter les spectateurs à revenir voir son film.

Un livre, on peut se dispenser de l'acheter une deuxième fois, à moins d'être un grand maniaque de la propreté.

Écrit par : Lapinos | mardi, 10 janvier 2006

Avec les cassettes ou le D.V.D., on fait tout de même quelques économies ! Je dois dire que, pour ce qui me concerne, le cinéma, qui recourt nécessairement à l'ellipse et à l'implicite, est pour moi plus "ironique" encore que le roman. Je préfère les films où il n'y a pas d'histoire, seulement des dialogues et des images — éléments qu'Alice jugeait essentiels à un bon livre. L'histoire la plupart du temps m'échappe si ma femme n'est pas là pour m'expliquer de quoi il retourne. J'ai l'impression, en lisant certains résumés de films, dans "Télérama" ou ailleurs, que pas mal de critiques professionnels devraient consulter leur conjoint plus souvent...

Écrit par : C.C. | mercredi, 11 janvier 2006

Elliptique, vous trouvez ? Moi je le trouve de plus en plus bavard, votre cinéma. Le cinéma français, particulièrement.
Je vous suis quand vous dites que le cinéma ce n'est pas d'abord une intrigue, mais je ne crois pas que ce soit des dialogues et des images non plus - il faut dire que j'apprécie particulièrement Buster Keaton ou le Japonais Kitano, presque muet.

Et puis vous oubliez la vitesse de défilement des images, des dialogues ; la subtilité de l'ironie oblige souvent à s'arrêter, à revenir une ligne ou une page en arrière - peut-être que je dis ça parce que j'ai le cerveau lent, mais pour moi le cinéma est forcément grossier au plan littéraire.

Écrit par : Lapinos | mercredi, 11 janvier 2006

le cinema "grossier au plan littéraire" !!!!!
mais le (vrai) cinéma se contrefout du "plan littéraire" !!!

le cinema se soucie de ses seuls "plans" à lui

quand le cinéma se soucie d'autre chose que ses "plans" , il tombe dans la littérature

Écrit par : hozan kebo | mercredi, 11 janvier 2006

Si le cinéma est "littéraire" (mais, là encore, cela n'a guère de sens de généraliser), c'est peut-être à la manière du nouveau roman. On nous donne à voir des choses dont nous sommes incapables de dire si elles procèdent du fantasme (du réalisateur ou des personnages) ou si elles renvoient à un univers de référence : monde réel ou monde possible... Un exemple : "Swimming pool" d'Ozon, donné à la télé cette semaine. La référence à la fabulation (l'affabulation) littéraire est ici explicite, et l'ambiguïté (l'ironie) constante. Les clefs fournies au spectateur sont fragiles : poses figées, débit mécanique de certains dialogues, image finale...
Je préfère finalement le vrai fantastique ou le merveilleux allégorique ; à ce titre "Shining" et le "Nosferatu" de Werner Herzog sont pour moi des chefs-d'œuvre. Leur ambiguïté participe à la construction du sens, elle n'est pas mystificatrice. Il faudrait encore citer David Lynch...
Mais, au fond, H.K. a raison : on reconnaît peut-être un bon film à ceci que, pas plus que la peinture non figurative ou la musique de jazz, il ne faut chercher à le "comprendre"...

Écrit par : C.C. | mercredi, 11 janvier 2006

Je me suis mal exprimé mais je suis assez d'accord avec Kebo, le cinéma ne devrait pas chercher à concurrencer la littérature, le théâtre. Le cinéma français, par exemple, ne fait que ça. Tout au plus peut-on dire de Keaton qu'il est "poétique". Je ne veux même pas parler de Lynch et de ses devinettes porno-chic consternantes. Kubrick, lui, a fait de bonnes adaptations, je citerais "Barry Lindon".

Lorsque Godard explique qu'il faut adapter de mauvais bouquins pour faire de bons films, on peut le prendre comme une boutade, mais aussi comme un aveu d'impuissance.

Et puis rassurez-vous, Constantin, je ne cherche pas à tout comprendre ; ainsi, j'ai un magnifique tapis iranien chez moi dont le sens m'échappe complètement et ça ne m'empêche pas d'aimer me rouler dessus ni de le contempler. Un peu d'exotisme ne fait pas de mal.

Écrit par : Lapinos | jeudi, 12 janvier 2006

Je crois que je vais vous laisser le mot de la fin. Ma culture cinématographique est vraiment par trop indigente, et mes goûts en la matière discutables.

Écrit par : C.C. | jeudi, 12 janvier 2006

Ah, vous savez rompre quand il faut, vous, au moins !

Écrit par : Lapinos | jeudi, 12 janvier 2006

Je reviens corriger une faute de goût : Kubrick a fait une bonne adaptation, "Barry Lindon".

Écrit par : Lapinos | lundi, 16 janvier 2006

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