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vendredi, 15 février 2019

Silènes

Arrivés hier, deux petits volumes d'André Blanchard que je ne possédais pas : Pèlerinages et Autres directions — Carnets 2006-2008 (Le Dilettante, 2009 et 2011). Bonheur de retrouver ce désenchanté, si proche par la manière et par l'esprit, de Calaferte ou Perros, autres dyscoles au grand cœur et à la plume alerte. Les couvertures sont hideuses, mais les livres — tels les "silènes" de Rabelais — sont au-dedans pleins d'une "celeste et impreciable drogue".
Au hasard, ce portrait express de Bloy, qui résume fort justement la duplicité — au sens premier du mot — du personnage :
"Bloy : la sébile dans une main, le goupillon dans l'autre, avec lequel, selon qu'on lui donne ou non, il asperge ou assomme." (Autres directions, p. 144)
Bien vu. C'est dit en trois lignes. Bloy est  — comme le sera plus tard Céline —, un vociférateur enragé, un imprécateur féroce dont la verve comminatoire époustoufle, en même temps qu'un pleurnichard rancuneux et vaguement répugnant. Ce sont là des gens qu'on admire — admirer "se dit aussi de la surprise que cause ce qui paraît extrême, excessif dans son genre" selon l'Académie —, mais qui ne suscitent guère de sympathie.
André Blanchard est, au contraire, de ceux qu'on aurait aimé connaître, pour ses "révoltes logiques", ses vacheries, ses faiblesses, sa pudeur ou sa mélancolie... Pour son humanité. Simplement.