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jeudi, 17 avril 2008

La conversation souveraine

parcouru trop vite, trop distraitement et — en dépit de sa minceur — abandonné avant la fin, le Rimbaud de Pierre michon ne m’a guère laissé que l’impression — sans doute injuste — d’un exercice de style assez vain. À ces pages un peu trop bien écrites, on peut préférer l’hommage, animé d’une ferveur presque brutale, que rené char rend à Rimbaud dans ses Grands astreignants — hommage à "Rimbaud le Poète", est-il précisé, plutôt qu’à Rimbaud le fils, "R. le Voyant, R. le Voyou, etc." :
"L’action de la justice est éteinte là où brûle, où se tient la poésie, où s’est réchauffé quelques soirs le poète. Qu’il se trouve un vaillant professeur pour assez comiquement se repentir, à quarante ans, d’avoir avec trop de véhémence admiré, dans la vingtième année de son âge, l’auteur des Illuminations, et nous restituer son bonheur ancien mêlé à son regret présent, sous l’aspect rosâtre de deux épais volumes définitifs d’archives, ce labeur de ramassage n’ajoute pas deux gouttes de pluie à l’ondée, deux pelures d’orange de plus au rayon de soleil qui gouverne nos lectures. Nous obéissons librement au pouvoir des poèmes et nous les aimons par force. Cette dualité nous procure anxiété, orgueil et joie."

Feuilleter Char à la veillée est un plaisir de choix.

Commentaires

Je trouve qu'il n'y a rien de plus "chiant" (je ne trouve pas d'autre mot plus fort - brennant peut-être) qu'un poète parlant de la Poésie (avec un grand P comme dans Académie) Par contre, un poète est effectivement le mieux placé pour délirer sur un autre poète. Et Char écrivant sur Rimbaud, ça doit valoir son pesant de pelures d'orange.
Cela étant, je suis d'accords : On s'en fout de ce petit con d'Arthur, du moment qu'on a un de ses poèmes dans la tête, pour l'éternité...

Écrit par : Martin-Lothar | vendredi, 18 avril 2008

Michon reconnaît aisément sombrer plus souvent qu'à son tour dans la « belle langue » - le « lambeau de pourpre » -, mais il possède par ailleurs, je crois, une capacité à la rupture qui le préserve, justement, de l'exercice de style (le « look roi Lear » qualifiant Beckett en est un bel exemple).
À vous lire encore,
DM.

Écrit par : DM | samedi, 19 avril 2008

Que j'aie été déçu par le "Rimbaud" de Michon (parce que je l'ai lu dans un mauvais jour, sans doute) n'enlève rien à l'estime que j'ai pour l'auteur de "La Grande Beune" ou des "Vies minuscules". Outre que l'homme m'est infiniment sympathique, je crois que c'est l'un de nos bons auteurs actuels — et même l'un des meilleurs : ils ne sont pas si nombreux ! Tant pis pour moi si je ne suis pas toujours un "suffisant lecteur"...
Merci pour votre commentaire, qui m'a permis de découvrir votre blog : les bons (comme les auteurs !) ne sont pas légion.

Écrit par : C.C. | samedi, 19 avril 2008

Merci beaucoup.
En passant :
« Redire rêve éveillé.
L'amour des mots nous guide sans que nous en éprouvions le sens. Et le rêve prend forme libéré de notre jugeote.
C'est alors que nous pressentons le secret qui nous fait écrire. »
(Robert Pinget, Taches d'encre, Minuit, 1997, page 51)

Écrit par : DM | samedi, 19 avril 2008

Sans jugeotte on a l'exercice de style. Baudelaire, Pound, sont d'abord des critiques. Et sans Baudelaire pas de Rimbaud mais des Char lourds.

Écrit par : Lapinos | lundi, 21 avril 2008

Comment un gentilhomme raisonnable comme Constantin peut accorder le moindre crédit à ce fumiste de Char, voilà qui me fiche le tournis.

Écrit par : Ph | mardi, 22 avril 2008

Admettez, Ph., qu'il y a malgré tout de belles choses dans les textes de Char, et profondes — même si, selon la formule de Valéry, il ne les y avait pas mises. Et pour ce qui est des fumistes, Rimbaud, justement, ou Apollinaire...

Écrit par : C.C. | vendredi, 25 avril 2008

Moins fumistes que Valéry, Rimbaud et Apollinaire.

Des poètes-philosophes comme Valéry, ce n'est d'ailleurs pas ça qui manque aujourd'hui. En revanche, plus de Verlaine, ni de Rimbaud, pas même d'Apollinaire.

(Copronyme, un gentilhomme ? Ah, merde, alors !)

Écrit par : Lapinos | dimanche, 27 avril 2008

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