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mardi, 01 janvier 2008

Nugæ

On lit, dans le prière d'insérer de Passage du temps, de Pascal Quignard (Galilée, 2006) : "Angulus est dans Ovide Tristes XVI". Allusion aux termes de l'incipit : "Dans chaque maison tout recoin a ses larmes." Mais la référence est fantaisiste : "Inque domo lacrimas angulus omnis habet" est le vers 24 des Tristes, I,3.

Commentaires

Triomphe du temps (j'ai craint, un instant, d'avoir manqué un Quignard…)
Oui, la référence est fantaisiste, comme – je le suppose – la plupart des références de Quignard : qu'il s'agisse des sources latines (voir Albucius ou Les Tablettes de buis…) comme de nombre de données que l'on pourrait croire livrées avec l'autorité du spécialiste, alors que l'auteur ne revendique aucune des spécialités qu'il "traverse" – comme on passe dans une pièce, en coup de vent (ne vous dérangez pas pour moi, je ne fais que passer…). Il en va ainsi de Pompéi – Le Sexe et l'Effroi exaspère les spécialistes –, des grottes préhistoriques (dans ce cas, personne ne pouvant se prévaloir d'un savoir sûr, la réaction est plus flottante) et même, je le pressens, de la biographie de Monsieur de Sainte Colombe…
Le prix de Quignard, à mes yeux, tient aussi dans cette superbe tacite à l'égard de l'archéologue qui ne se contente pas de fouiller, de l'historien donneur de leçons. La référence est fausse, voire de pure invention ! Tout débat est clos d'emblée. Place nette est faite à la langue, soudain souveraine.
Merci de m'avoir fait sortir du bois ce beau petit volume, acquis en même temps que les cinq ou sept autres parus chez Galilée à l'époque. Je n'avais pas encore lu celui-là, vous m'indiquez que le moment en est venu.
Pensée cordiale en ces premiers jours de l'année. Merci de votre présence sur la Toile.

Écrit par : Dominique Autié | mercredi, 02 janvier 2008

La pratique de la citation louche (j’emploie ce mot, faute de mieux, avec un sens proche de celui qu’il a en grammaire), oblique ou biaisée, relève, avec toutes les variations qu’elle autorise, d’un art subtil, plus complexe, en tout cas que celle de la référence factice. Elle instaure le soupçon, invite au jeu le "suffisant lecteur" — tout en mystifiant à l’occasion le lecteur suffisant ou le "lecteur paranoïaque" dont parle Umberto Eco. Celui-ci, à propos de la glose sur "angulus", nous parlerait peut-être d’un monde possible dans lequel les "Tristes" comporteraient seize livres — ou davantage ! —, dans lequel on aurait bien la preuve que saint Augustin a écrit quelque part inter fæces et urinam nascimur" et Thomas a Kempis "sicut nubes, quasi naves, velut umbra".
Bien à vous, cher D.A. Votre blog reste une … référence, et un bonheur au milieu de tant d’insignifiance et de médiocrité.

Écrit par : C.C. | jeudi, 03 janvier 2008

Moi, Pascal Quignard n'a pas encore éveillé mon estime, et cette affaire de citation bidon ne va pas arranger son cas.

Écrit par : Ph | lundi, 07 janvier 2008

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