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lundi, 09 mars 2015

Petites perambulations hexagonales 6

000card.jpgCourte excursion, ce week-end, dans les Causses et en Aubrac. Peu de monde, en cette saison, sur les routes étroites et tortueuses qui sinuent dans les gorges, au-dessus des précipices.
Temps printanier avant l'heure. Premier papillon de l'année — un citron, Gonepteryx rhamni — aperçu près du château de La Caze — nous en verrons un autre, le lendemain, à Marvejols. Papillons de l'enfance, si semblables, immobiles, à des feuilles pâles que nous saisissions entre deux doigts... À Sainte-Enimie, surplombant une ruelle en pente, tout un parterre de violettes embaume. Nombreuses haltes, sur notre parcours, pour profiter de paysages magnifiques, auxquels le vide de la saison restitue un peu de leur sauvagerie originelle.
Nous nuitons à Meyrueis dans un méchant hôtel. Dîner toutefois acceptable, avec une bonne tarte cévenole, noix et chocolat, et un sympathique petit vin des côtes de Millau.
Au retour, brève halte à Mende et Marvejols, villes grises, figées dans la léthargie dominicale ou, la rumination de leur légende — guenille de bronze verdâtre acagnardée sur son rocher, la Bête du Gévaudan, gueule bée, feule muettement son sempiternel ennui...
Après quelques lieues à travers les vastes pâtures de l'Aubrac, roussies par l'hiver, semées d'amas pierreux, coupées de mouillères et de neiges oubliées, dernière étape à Nasbinals : pèlerinage littéraire en mémoire de Pierre Autin-Grenier, qui célébra naguère les bégonias de Mme Souchon, dans une belle nouvelle où il est également question d'écureuils et de Thomas Bernhard. Les choses sont toujours plus belles dans les livres et dans nos rêves. Les noms qui ont nourri ces rêves ne sont que des noms, des toponymes pas même imaginaires — comme ceux des romans de Vialatte. Nasbinals se résume à un code postal. La devanture de la maison Souchon a été refaite au mauvais goût du jour : au-dessus de la vitrine, le mot "Charcuterie" s'épelle en lettres de plastique, énormes, d'un rose cru, évoquant le sorbet plutôt que les cochonnailles...
Reverra-t-on, aux beaux jours, les bégonias au balcon de la boutique ? Peut-être sont-ils à jamais fanés, desséchés ou flétris. "Stat rosa pristina nomine, nomina nuda tenemus..."